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30 juin 2008

La culture africaine favorise le maintien de Mugabe, regrette le rappeur Jal

LONDRES (AFP) — La culture africaine, en insistant sur le respect dû aux anciens, empêche les élites du continent de dénoncer sans retenue le président zimbabwéen Robert Mugabe, déplore dans un entretien à l'AFP le jeune rappeur soudanais Emmanuel Jal.

Arrivé au pouvoir en 1980, Robert Mugabe, 84 ans, fait figure de patriarche pour les dirigeants africains, ainsi enclins à modérer leurs critiques, estime la star africaine du hip hop dans cette interview accordée à l'AFP après le concert de Hyde Park pour le 90e anniversaire de Nelson Mandela, vendredi soir à Londres.

"C'est difficile. Mugabe est considéré comme un héros", constate Jal. "Il a obtenu l'indépendance pour son pays, il l'a dirigé pendant plus de 20 ans et il a aidé la plupart de ces pays africains: aidé le mouvement anti-apartheid en Afrique du Sud, aidé l'Angola."

"Il a aidé tous ces dirigeants et il a gagné leur respect", insiste-t-il. "Le proverbe dit de ne pas témoigner d'ingratitude envers la personne qui vous a aidé. Alors maintenant, c'est difficile. Même s'il a tort, ces dirigeants n'ont aucun moyen de lui forcer la main".

Robert Mugabe est assuré d'être réélu à la tête du Zimbabwe, après le second tour de l'élection présidentielle vendredi, boycotté par l'opposition qui, tout comme l'Occident, a qualifié le scrutin de "farce".

Conscience de l'Afrique, Nelson Mandela, 89 ans, a dénoncé mercredi au cours d'un dîner de charité à Londres, après s'être abstenu de tout commentaire pendant des années, la "tragique défaillance de la direction" du Zimbabwe.

L'initiative de l'ancien président sud-africain est source d'espoir, pour Jal. "Parce qu'il est l'un des anciens, Mandela a le droit de parler, selon les critères de la culture africaine", explique-t-il. "Mugabe devra l'écouter. Si Mugabe aime réellement le peuple zimbabwéen, il devra faire quelque chose pour sauver le pays".

Les violences qui ont eu lieu au Zimbabwe entre les deux tours de l'élection présidentielle sont à ses yeux tragiques.

"C'est ainsi que les guerres éclatent", met-il en garde. "Elles commencent avec quelque chose sans trop d'importance comme ça, vous opprimez les gens. Si vous opprimez quelqu'un un jour, il tentera de réagir. C'est difficile d'opprimer quelqu'un continuellement sans qu'il réagisse".

Il y a quinze ans, enfant soldat dans un Soudan déchiré par la guerre civile, Jal envisageait le suicide. Recruté de force à huit ans par l'Armée de Libération du Peuple Soudanais (SPLA), il a passé quatre ans dans la savane soudanaise, fusil en mains.

Au concert vendredi, où Peter Gabriel l'a présenté en estimant qu'il avait "le potentiel d'un jeune Bob Marley", Jal a chanté "Emma", chanson de son dernier album "Warchild" (enfant soldat) dédiée à la travailleuse humanitaire britannique Emma McCune, qui l'avait libéré avec 150 autres enfants soldats. Elle est décédée peu après dans un accident d'autocar au Kenya en 1993.

Le destin zimbabwéen est ainsi profondément enraciné dans sa propre expérience.

"Ce que je crains, c'est que si Mugabe est isolé et acculé, et que si nous parlons de façon négative de lui, nous risquons d'en faire un monstre", dit-il. "Si nous faisons ça, il va commencer à tuer les gens, c'est un soldat. Cela fait peur. S'ils utilisent la force, alors le Zimbabwe perdra beaucoup."

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